CEDEAO: les Etats membres divisés sur une éventuelle intervention militaire au Niger

Paul Danongbe
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Les dirigeants de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao), réunis dimanche 30 juillet dans la capitale du Nigeria voisin pour un sommet d’urgence après le coup d’État militaire au Niger, ont donné un ultimatum d’une semaine aux putschistes pour restaurer l’ordre constitutionnel, affirmant ne pas exclure un “recours à la force”. Ce vendredi 4 août, les Chefs d’Etat-major de l’institution sous-régionale ont défini au bout de trois jours, les contours d’une «éventuelle intervention militaire». A quelques heures de l’expiration de cette injonction, les Etats membres de la Cédéao sont divisés sur les voies choisies pour une issue à la situation.

 

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Combien de pays membres de la Cédéao sont-ils disposés à envoyer un contingent militaire au Niger pour libérer Mohamed Bazoum et rétablir l’ordre constitutionnel ? La crise politique au Niger laisse éclater au grand jour, un profond problème de synergie d’actions et d’unification de l’Afrique autour des principales équations géopolitiques qui touchent le continent. Alors que nous sommes à quelques heures de la fin de l’ultimatum fixé par l’institution sous-régionale, difficile de dire avec certitude, lesquels des quatorze (14) autres pays que compte la Cédéao vont déployer un contingent militaire pour participer à l’opération envisagée au Niger.

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Le Burkina et le Mali au delà du refus catégorique

Au lendemain de l’annonce de la mesure de l’intervention militaire dans le pays désormais aux mains du Général Abdourahamane Tchiani et ses hommes, le Burkina et Mali ont aussitôt réagi dans un ton assez incisif. En effet, les deux pays, également dirigés par des militaires “avertissent que toute intervention militaire contre le Niger serait considérée comme une déclaration de guerre contre le Burkina Faso et le Mali”. Ils “préviennent que toute intervention militaire contre le Niger entraînerait un retrait du Burkina Faso et du Mali de la Cédéao (Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest), ainsi que l’adoption de mesures de légitime défense en soutien aux forces armées et au peuple du Niger”. Ils ajoutent par ailleurs qu’ils “refusent d’appliquer” les “sanctions illégales, illégitimes et inhumaines contre le peuple et les autorités nigériennes” décidées à Abuja.

Le Tchad n’interviendra jamais militairement. Nous avons toujours prôné le dialogue. Le Tchad est un facilitateur .

Daoud Yaya Brahim, ministre tchadien des armées.

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Le Tchad et d’autres puissances pour des voies pacifiques

Des jours après – alors que la menace de l’organisation sous-régionale est restée inchangée – les deux pays dirigés respectivement par le Colonel Assimi Goïta et le Capitaine Ibrahim Traoré ont été rejoints par d’autres Etats. Même si ces derniers n’évoquent pas comme le Mali et le Burkina, une sorte de réplique laissant traduire une prise de bec et des bruits de bottes, ces nations proposent plutôt à la Cédéao d’opter exclusivement pour les voies pacifiques pouvant conduire à une issue favorable de la situation. On note parmi ceux-ci, la Guinée, le Tchad qui font aussi partie de la Cédéao, et l’Algérie, premier pays d’Afrique par sa superficie. Ces pays, même s’ils n’évoquent pas clairement une réplique opposent cependant, un refus catégorique à toute intervention militaire au Niger, préférant en lieu et place, des voies totalement pacifiques.

Si demain, la CEDEAO décidait de quelle que raison que ce soit d’engager une action particulière, le Bénin serait solidaire. Nous souscrivons entièrement aux actions diplomatiques qui restent la solution privilégiée par tous.

Olushegun Bakar, ministre béninois des affaires étrangères

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Le Nigéria, le Bénin, le Sénégal favorables à l’intervention militaire

Alors que le bras de fer continue de se durcir entre les auteurs du coup d’État au Niger et la Cédéao, plusieurs pays, notamment le Nigeria, le Bénin et le Sénégal, ont déjà indiqué qu’ils mobiliseront des troupes en cas d’intervention militaire vers Niamey. « Si demain, la CEDEAO décidait de quelle que raison que ce soit d’engager une action particulière, le Bénin serait solidaire. Nous souscrivons entièrement aux actions diplomatiques qui restent la solution privilégiée par tous », a-t-il déclaré vendredi, le chef de la diplomatie béninoise.

Le Sénégal pour sa part, a évoqué les engagements internationaux de son pays envers la Cédéao et le fait qu’il s’agissait du “coup (d’Etat) de trop”. “Les militaires sénégalais, pour toutes ces raisons, vont y aller”, rassure la ministre des affaires étrangères.

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Le Niger impertubable

A Niamey, le Général Abdourahamane Tchiani et ses hommes n’en démordent guère. Enumérant un certain nombre de raisons dont l’incapacité du président Mohamed Bazoum à faire face au terrorisme, la junte tient mordicus à son projet de sauvegarde de la patrie. Malgré les initiatives de médiation engagées par la Cédéao, ces autorités dirigées par le Général Tchiani ne donnent visiblement aucune opportunité de les faire revenir sur leur décision. Vendredi, ils ont envoyé une mise en garde à l’organisations sous-régionale, menaçant d’attaquer un pays membre en cas d’intervention militaire de la CEDEAO dans le pays.

La Cédéao va-t-elle réussir cette mission ? Qu’en sera-t-il du peuple nigérien si l’intervention intervenait vraiment ?

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