Les Chefs d’Etat de la Cédéao tiennent un nouveau sommet le jeudi 10 août 2023 à Abuja après l’expiration de l’ultimatum dimanche soir. Dans un communiqué mardi 8 août, Ajuri Ngelale, porte-parole du président Bola Tinubu a évoqué dans une déclaration, la préférence du président nigérian d’une résolution obtenue par des moyens diplomatiques plutôt qu’une intervention militaire. Une déclaration savamment décryptée par le béninois Joël Atayi-Guèdègbé, Consultant en communication et gouvernance politique qui a évoqué plusieurs angles.
La situation au Niger focalise l’attention de nombreux observateurs dans la sous région ouest africaine. Malgré les sanctions économiques et l’ultimatum posés par la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), et ce, pour libérer le président déchu Mohamed Bazoum et rétablir l’ordre constitutionnel au Niger, le Général Abdourahamane Tchiani et ses hommes semblent bien plus que s’illustrer à travers un jusqu’au-boutisme perçu dans les autres Etats membres.
Ce mardi 8 août, les autorités militaires au pouvoir ont refusé de recevoir par exemple, la délégation tripartite composée de représentants de l’ONU, de l’Union africaine et de la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (Cédéao) à Niamey. A quelques heures du sommet du jeudi à Abuja, et malgré la fin de ultimatum qui devait aboutir à une intervention militaire, les Chefs d’Etat réunis au sein de la Cédéao mettent déjà de l’eau dans leur vin et visent les voies diplomatiques.
Chaque vie humaine compte, et cela signifie que chaque décision prise par le bloc (ouest-africain) le sera en tenant compte de la paix, de la stabilité et du développement non seulement de la sous-région, mais aussi du continent africain.
Ajuri Ngelale
En effet, dans une déclaration mardi soir, Ajuri Ngelale, porte-parole du président nigérian a indiqué que Bola Tinubu et les dirigeants des autres pays de la Cédéao « préféreraient une résolution obtenue par des moyens diplomatiques, par des moyens pacifiques, plutôt que tout autre ». Il précise que cette position serait maintenue « en attendant toute autre résolution qui pourrait ou non résulter du sommet extraordinaire de la Cédéao prévu jeudi ». « Nous nous attendons à ce que d’importantes décisions soient prises » lors de ce sommet, a ajouté le porte-parole, sans donner plus de précisions.
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La Cédéao est déjà assez mal en point dans les opinions publiques pour aller davantage à l’aventure.
Joël Atayi-Guèdègbé
Le décryptage de Joël Atayi-Guèdègbé
Réagissant aux conséquences provoquées par les sanctions de la Cédéao sur les pays de la sous-région ouest africaine et surtout sur la menace de l’intervention militaire envisagée, Joël Atayi-Guèdègbé relève quelques “inaptitudes” de l’organisation sous-régionale. « Fatalement, la Cédéao joue sa crédibilité. De ce point de vue, tout le monde sait qu’elle n’a pas la capacité opérationnelle de débarquement à cette échelle », fait-il constater dans un premier temps, ce mercredi au micro de France 24.
Selon lui, il faudra privilégier par tous les moyens – tout comme le souhaite désormais la Cédéao – les échanges pour « éviter les dégâts collatéraux qui pourraient naitre d’une intervention militaire plutôt mal maitrisée ». Mieux, le Consultant béninois en communication et gouvernance politique évoque le risque que représente l’intégrité physique du président déchu Mohamed Bazoum. « De quelle manière peut-on garantir sa sécurité? », s’interroge par ailleurs, Joël Atayi-Guèdègbé.
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La Cédéao n’a pas réussi sa mue.
Joël Atayi-Guèdègbé
L’extension d’un nouveau front politique dans la sous-région
L’acteur connu au sein de la société civile au Bénin, souligne également dans son analyse, un risque d’extension d’un nouveau front, un nouveau modèle politique dans la sous région ouest africaine, surtout avec le soutien manifestement affiché par le Burkina et le Mali, des pays aussi dirigés par des militaires. « On le craignait déjà depuis le premier coup de 2022 au Burkina. C’est quasiment la chronique d’une déstabilisation annoncée; mais les signes avant-coureurs sont bien plus profonds, plus nombreux qu’on ne le pense. Là, c’est les épiphénomènes que nous voyons et il est peu trop tard pour traiter la situation », a souligné Joël Atayi-Guèdègbé.
Pour lui, « la Cédéao n’est pas à dédouaner parce qu’elle n’a pas réussi sa mue parce qu’elle a promis être la communauté des peuples, mais on a l’impression que ça devient un syndicat de Chefs d’Etat », va-t-il conclure.