Crise au Sénégal : la France se désolidarise de Macky Sall sur le report de la présidentielle

Mohamed Fousso
Lecture : 5 min
Macky Sall, Président du Sénégal. @Médias locaux

Macky Sall de plus en plus seul dans sa décision de maintenir le report de la présidentielle initialement prévue pour le 25 février prochain. En effet, la question du report de l’élection présidentielle a été discutée à l’Assemblée nationale française, où un député a directement interrogé le ministre de l’Europe et des Affaires étrangères.

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Dans un discours vibrant, le député Aurélien Taché a souligné les manœuvres du président Sall pour influencer sa propre succession, citant la suppression de la procédure des parrainages citoyens et l’adoption d’une loi controversée repoussant les élections. Il a également évoqué les circonstances douteuses entourant l’adoption de cette loi, incluant l’évacuation forcée des députés d’opposition de l’Assemblée par la police, qualifiant ces actions de “coup d’État institutionnel”.

En réponse, le ministre Stéphane Séjourné a exprimé la profonde préoccupation de la France face à la situation, soulignant l’importance de préserver la tradition démocratique du Sénégal. Il a appelé à une organisation rapide de l’élection présidentielle, conforme à la constitution sénégalaise, et a affirmé l’engagement de la France à soutenir un dialogue inclusif entre toutes les parties concernées.


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Verbatim du député Aurélien Taché

Monsieur le Ministre des Affaires étrangères, depuis l’annonce dimanche par le président Macky Sall du report de l’élection présidentielle, le Sénégal est au bord du chaos. Alors que depuis plus d’un an, il a multiplié les manipulations pour influer sur sa succession, c’est le principe même de celle-ci qui n’est maintenant plus garanti. Il a d’abord laissé planer le doute sur sa volonté de briguer un troisième mandat quand la Constitution lui en autorise deux, puis a renoncé face à la colère populaire. Le pouvoir sénégalais a alors multiplié, dans une pure logique de l’au-faire, les procès contre son principal opposant, Ousmane Sonko, qui a finalement été déclaré inéligible pour avoir diffamé l’un de ses ministres. Mais les différents partis d’opposition n’ont pas renoncé, sentant l’élection à haut risque pour son dauphin.

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Macky Sall est alors passé en force et a fait adopter une loi qui reporte les élections de la fin du mois à la fin de l’année. Cette loi proscrit aussi désormais la procédure des parrainages citoyens, éliminant ainsi tous les candidats légalement désignés par le peuple. Monsieur le Ministre, au-delà de son contenu antidémocratique, vous avez vu comme moi les conditions dans lesquelles cette loi a été adoptée, en l’absence des députés d’opposition que la police a fait évacuer de force de l’Assemblée. Le 23 juin 1789, au nom de ses collègues refusant d’obéir au roi, Mirabeau a prononcé ses fameux mots : ‘Allez dire au roi que nous sommes ici par la volonté du peuple, et que nous n’en sortirons que par la force des baïonnettes’. Et bien, Monsieur le Ministre, c’est exactement ce qui est arrivé aux députés sénégalais. Certains ont d’ailleurs été encore arrêtés hier.

Et face à cela, la France, patrie de la démocratie et malgré un douloureux passé colonial, grand ami du Sénégal, ne peut rester silencieuse, alors que nos échecs sur lesquels ont prospéré nos ennemis nous ont totalement marginalisés au Sahel. Notre voix, la vôtre, est plus que jamais attendue à Dakar. En recevant Macky Sall à l’Élysée en novembre dernier, le président Macron avait semé le trouble. Mais peut-être avait-il encore le bénéfice du doute. Celui-ci n’est désormais plus permis. Alors, comme démocrate et internationaliste convaincu, je crois qu’on attend votre engagement, Monsieur le Ministre, et surtout, comme ministre de la France, condamnez-vous clairement le coup d’État institutionnel en cours au Sénégal, et appelez-vous, comme l’Union africaine et la CEDEAO, au maintien des élections le 25 février prochain ? Je vous remercie. (Applaudissements)

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