Au Sénégal, Ousmane Sonko et son gouvernement ont récemment présenté un état des lieux de la situation économique, dans lequel, ils accusent le régime du président Macky Sall, de dérapages financiers, de mauvaise gouvernance, de “détournement des deniers publics”, mais aussi de fausses déclarations de dette et du déficit public du pays aux partenaires internationaux. Des accusations qui ont fait réagir Amadou Ba, le premier ministre sortant qui a avancé des chiffres contestés par le pouvoir du président Bassirou Diomaye Faye.
La polémique sur la santé financière du Sénégal s’intensifie, opposant l’ancien régime de Macky Sall à l’administration actuelle d’Ousmane Sonko. Se rappelle-t-on, jeudi 26 septembre dernier, l’actuel Premier ministre, lors d’une conférence de presse à Dakar a dénoncé une série d’irrégularités dans la gestion conduite par son prédécesseur. « Nous étions loin de nous imaginer que les choses étaient aussi catastrophiques », avait fait savoir Ousmane Sonko.
« La politique d’endettement effrénée [suivie sous l’ex-président Macky Sall] a donné lieu à l’utilisation des ressources non transparente et favorable à une corruption généralisée », a accusé M. Sonko, qui a ensuite dénoncé une « méthodologie (…) pour détourner en masse des deniers publics ». Et ce n’est pas tout. Il a également révéler que l’ex président Macky Sall et son gouvernement avaient menti au peuple sénégalais et aux partenaires financiers du pays. « Le régime de Macky Sall a menti au peuple, a menti aux partenaires, a tripatouillé les chiffres pour donner une image économique, financière, qui n’a rien à voir avec la réalité », a-t-il insisté. Ousmane Sonko a, par conséquent, promis des enquêtes pour situer les responsabilités.
La ferme réaction d’Amadou Ba
Après les accusations du Premier ministre sur les faits de mauvaise gouvernance dans la gestion du régime sortant, Amadou Ba, ancien Premier ministre, a fermement rejeté ce qu’il appelle des allégations de mauvaise gestion formulées à l’encontre de son ancien gouvernement. Selon lui, la situation financière du pays était stable à la fin de son mandat. Il conteste les affirmations de Sonko et met en avant des chiffres qu’il considère comme révélateurs d’une gestion réussie. « En matière de finances publiques, les chiffres sont sans équivoque. Les recettes budgétaires, témoins de la bonne performance de nos administrations financières et de la vigueur de notre économie, ont connu une progression constante », a-t-il d’ailleurs déclaré.
Il avance en revanche que la stratégie de développement adoptée par leur régime a porté ses fruits, avec une quasi-doublure des recettes budgétaires en six ans, passant de 2 345 milliards à près de 4 000 milliards de francs CFA. De plus, il souligne que le produit intérieur brut (PIB) est passé de 9 775 milliards en 2014 à 13 197 milliards en 2019.
Amadou Ba, qui a été ministre de l’Économie jusqu’en avril 2019, insiste notamment sur le fait qu’il n’a pas quitté ses fonctions en laissant la caisse vide. « Au moment de ma passation de service, j’ai laissé en trésorerie à la Banque centrale une somme de 270 milliards de francs CFA, comme en atteste le procès-verbal de passation », a-t-il ajouté.
Il soupçonne également Ousmane Sonko de vouloir nuire à l’image des anciennes autorités, ce qui pourrait expliquer les tensions actuelles sur la gestion financière du pays.
Un débat contradictoire pour mettre fin à une guerre des chiffres
À la suite de ces détails fournis par son prédécesseur, Ousmane Sonko est revenu à la charge ce mardi 22 octobre, proposant ainsi à Amadou Ba, un débat contradictoire public pour clarifier les positions de chacun sur la situation économique et financière du Sénégal. « Monsieur Amadou Ba a décidé de sortir de l’ombre et de ne plus se cacher derrière ses mercenaires de la plume et autres. Tant mieux, car le jeu du mythe et du combat politique par procuration ne saurait prospérer plus longtemps », a -t-il écrit sur son compte X.
Et pour cet exercice, le Premier ministre propose quatre principaux pour meubler les échanges au cours de ce débat. Il s’agit notamment de la dette et le déficit publics, la fiscalité, la gestion des ressources naturelles, la Vision 2050, etc. « Ce sera l’occasion d’aborder, entre autres, les questions liées à la dette et au déficit publics, à la fiscalité, au foncier, aux mines et hydrocarbures, ainsi qu’à la masse salariale. Nous pourrons enfin discuter de la Vision 2050 et permettre à monsieur Ba de partager ses appréciations à ce sujet », a-t-il par ailleurs précisé.
Amadou Ba va-t-il se prêter à l’exercice ? L’opinion publique attend de voir.