Nommé le 11 décembre 2024, Sacca Kina Bio Guera, ministre conseiller à l’Agriculture fait le point des avancées, les défis et les perspectives du secteur agricole sous la gouvernance du président Patrice Talon. Des performances records du coton à l’essor du soja et de l’anacarde, en passant par les ambitions de transformation locale, il revient aussi sur les stratégies du gouvernement pour renforcer l’exportation, soutenir les producteurs et consolider la dynamique de modernisation. Dans cette interview exclusive à Africaho, le ministre conseiller a aussi porté son regard sur les échanges électorales de 2026, sans occulter ses ambitions politiques et ce qu’il retient de la gouvernance Talon.
Africaho : Monsieur le ministre, l’agriculture occupe une place de choix dans l’économie béninoise pilotée depuis 2016 sous l’administration Talon. Comment se portent les différentes filières ?
Saka Kina Bio Guera : L’agriculture reste l’épine dorsale de l’économie béninoise, représentant environ 30 % du PIB et employant plus de 60 % de la population active. Aujourd’hui, grâce à une volonté politique forte et à une stratégie bien définie, nos différentes filières se portent globalement mieux. Le coton, qui reste notre produit phare, a connu des records de production ces dernières années, avec des rendements jamais atteints dans certaines zones. Le maïs, le riz et le manioc sont de plus en plus valorisés localement à travers des chaînes de transformation, réduisant notre dépendance aux importations.
Dans le même temps, nous avons misé sur les cultures dites à haute valeur ajoutée comme l’ananas, le soja et l’anacarde, qui bénéficient désormais d’un meilleur encadrement technique, de subventions ciblées et d’un meilleur accès au marché. Le Gouvernement investit également dans la recherche agricole, dans l’irrigation, et dans la modernisation des équipements.
Certes, des défis subsistent, notamment l’accès au financement pour les petits exploitants et la résilience face aux changements climatiques, mais la trajectoire est nettement ascendante.
La campagne agricole 2025-2026 est déjà lancée. Quelles sont les attentes du Gouvernement ?
La campagne agricole 2025-2026 s’inscrit dans une dynamique de consolidation et de passage à l’échelle. Le Gouvernement attend des résultats supérieurs à ceux de la précédente campagne, en termes de rendement à l’hectare, de qualité de la production, et surtout de valeur ajoutée locale.
Pour y parvenir, nous avons renforcé la distribution des intrants à travers l’Agence Territoriale de Développement Agricole (ATDA), mis à disposition plus de 1 500 tracteurs pour les producteurs, et accru le nombre de techniciens agricoles dans les zones rurales. Un accent particulier est mis sur les filières porteuses de devises (comme le soja et l’anacarde), sur la relance des périmètres irrigués et sur la réduction des pertes post-récolte grâce à de nouveaux équipements de conservation.
Le Gouvernement entend aussi renforcer les synergies avec les coopératives agricoles, car nous croyons que le développement de l’agriculture passera par une structuration plus efficace des acteurs à la base.
Le Bénin est l’un des grands producteurs de coton en Afrique. Face à la concurrence avec le Mali, que fait le Gouvernement pour porter les ambitions encore plus haut dans ce secteur ?
Le coton béninois, que l’on appelle désormais l’or blanc, a retrouvé toute sa place sur l’échiquier africain grâce à une gouvernance exemplaire. Ces dernières campagnes, le Bénin a été premier producteur de coton en Afrique de l’Ouest, avec des volumes avoisinant les 700 000 tonnes. Face à la concurrence notamment du Mali, le Gouvernement ne se repose pas sur ses lauriers.
Nous avons lancé une politique de modernisation de la filière avec : l’amélioration génétique des semences, l’introduction de technologies agricoles intelligentes, et la formation continue des producteurs. En plus de cela, nous avons sécurisé les prix au producteur pour garantir une rémunération juste. Mais notre ambition ne s’arrête pas à la production brute : nous voulons transformer davantage sur place.
Déjà, plusieurs unités d’égrenage ont vu le jour, et des projets de filatures et de confection textile sont en cours à Glo-Djigbé. L’idée est de faire du coton non seulement un produit d’exportation, mais aussi un vecteur d’industrialisation nationale.
Ces dernières années, l’État a investi dans des filières innovantes telles que le soja et l’anacarde. Que pèsent-elles réellement dans l’économie béninoise ?
Le poids économique de ces filières est de plus en plus visible. Le soja, par exemple, est passé de quelques milliers de tonnes à plus de 300 000 tonnes en moins d’une décennie. Il est aujourd’hui l’un des principaux produits d’exportation du pays, avec une demande en forte croissance, notamment en Chine, en Inde et au Vietnam.
L’anacarde, quant à lui, représente désormais environ 7 % des recettes d’exportation agricoles. Ces filières ne sont pas seulement rentables à l’export. Elles créent aussi de l’emploi local, surtout pour les femmes dans les unités de transformation, et participent à la dynamisation des territoires ruraux.
Le Gouvernement soutient leur développement à travers des incitations fiscales, des formations, l’accès au crédit rural et la mise en place de pôles agricoles régionaux. Ces cultures contribuent ainsi à la diversification de notre économie et à la réduction de notre dépendance au coton.
Monsieur le ministre, l’exportation des produits agricoles est-elle un levier important de croissance économique ? Quelles stratégies sont mises en place pour accroître la compétitivité des produits sur le marché international ?
L’exportation agricole est plus qu’un levier : c’est un catalyseur du développement. Elle permet non seulement de générer des devises, mais aussi de structurer les filières, d’améliorer les pratiques agricoles, et d’attirer des investissements privés.
Pour renforcer la compétitivité de nos produits, le Bénin mise sur plusieurs axes stratégiques : d’abord, la qualité, avec la mise en place de normes phytosanitaires strictes et de certifications internationales ; ensuite, les infrastructures, avec des routes rurales, des entrepôts modernes et des zones industrielles dédiées à la transformation. Nous travaillons aussi à lever les barrières non tarifaires à l’exportation et à négocier des accords commerciaux plus avantageux.
Enfin, le Gouvernement appuie les organisations de producteurs pour leur permettre d’accéder directement aux marchés étrangers, sans intermédiaires prédateurs. À terme, nous visons une agriculture exportatrice, compétitive et durable.
Vous avez été suppléant député, Chef d’arrondissement et maintenant Ministre Conseiller. Quelles sont vos ambitions pour 2026 ?
Ma carrière a toujours été guidée par un engagement profond au service des populations. Que ce soit comme élu local ou aujourd’hui comme membre du Cabinet du Président de la République, je suis resté fidèle à cette logique de proximité, d’écoute et d’action.
Pour 2026, mon ambition est de continuer à jouer un rôle actif dans le développement de notre pays. Je suis prêt à assumer des responsabilités politiques plus importantes, si telle est la volonté des électeurs et des responsables de mon parti. Je veux défendre les intérêts des agriculteurs, des jeunes entrepreneurs, des femmes battantes qui transforment notre pays au quotidien.
Mon ambition, c’est de contribuer à bâtir un Bénin où chacun peut vivre dignement de son travail, dans la paix et la fierté.
Vous êtes membre du parti Union Progressiste le Renouveau. Comment se porte le parti dans la première circonscription électorale ?
Le parti Union Progressiste le Renouveau est solidement implanté dans la première circonscription. Nos structures sont dynamiques, les militants engagés, et les résultats électoraux des dernières années en témoignent.
Nous avons su renforcer la cohésion interne, renouveler les instances locales et impliquer davantage la jeunesse et les femmes dans les décisions. C’est cette force de terrain qui fait notre différence : nous sommes connectés aux réalités des populations.
La première circonscription électorale reste un bastion stratégique pour notre parti, et nous y travaillons chaque jour pour garder le contact et répondre aux attentes concrètes des citoyens.
Quelles sont les chances de la mouvance présidentielle à l’élection présidentielle de 2026 ?
La mouvance présidentielle dispose d’un atout majeur : un bilan concret et visible. Sous le leadership du Président Talon, le Bénin a changé d’image : modernisation des infrastructures, amélioration du climat des affaires, réformes institutionnelles courageuses, développement du numérique, promotion de la femme, etc.
Les populations voient les changements dans leur quotidien. Les écoles sont mieux équipées, les hôpitaux fonctionnent mieux, les routes sont construites jusque dans les coins les plus reculés.
Cette crédibilité, nous la porterons en 2026. Et avec un candidat de rassemblement, porteur de la vision de la continuité et du progrès, la victoire est non seulement possible, mais probable.
Vous êtes collaborateur du Président Patrice Talon dont le mandat prend fin dans moins d’un an. Que retenez-vous de sa méthode ? Et quel héritage politique laisse-t-il aux Béninois selon vous ?
Le Président Talon est un homme d’État d’exception. Ce que je retiens de sa méthode, c’est la rigueur, le pragmatisme et l’exigence de résultats. Il n’a jamais fait de promesses démagogiques : il a agi, méthodiquement, dans l’intérêt du pays. Il a assaini les finances publiques, mis fin à certaines pratiques clientélistes, redonné à l’administration son efficacité.
Son héritage, c’est un Bénin plus respecté, plus structuré, plus ambitieux. Il lègue un pays doté d’une vision claire, avec des institutions renforcées et une population de plus en plus exigeante, ce qui est une bonne chose pour la démocratie.
Le Bénin post-Talon est un pays qui a pris goût à la rigueur, à la discipline et à l’efficacité. Et c’est ce socle qu’il nous revient désormais de consolider.
Réalisation : Paul Danongbe – Marturin Atcha – Casimir Vodjo