Daniel Chapo, élu président du Mozambique lors du scrutin du 9 octobre, prendra officiellement ses fonctions ce mercredi 15 janvier, après la confirmation de sa victoire par le Conseil constitutionnel fin décembre. Toutefois, son investiture se déroule dans un contexte tendu, marqué par une contestation croissante de l’opposition et d’une partie de la société civile, qui remet en question la légitimité de son élection.
Un président contesté dès son arrivée. Dans les rues de Maputo, la capitale, l’accueil réservé à Daniel Chapo est loin d’être enthousiaste. À Maxaquene, quartier populaire situé à proximité de l’aéroport, Paulo, un chauffeur de triporteur, déclare : « C’est qui, Chapo ? Moi, je ne le connais pas Chapo. Ce n’est pas mon président ». Ce dernier est venu soutenir Venancio Mondlane, principal opposant à Chapo et candidat malheureux lors de la présidentielle. Mondlane, de retour d’un exil de deux mois, continue de revendiquer sa victoire et a prêté serment devant ses partisans, cherchant ainsi à faire de l’ombre à l’investiture de son rival. Dans le quartier, son nom est omniprésent, et les Mozambicains, en réponse à des questions sur Chapo, réagissent souvent avec moquerie.
Un parcours politique discrète et un choix stratégique du Frelimo
Daniel Chapo, bien que difficile à cerner pour une partie de la population, se distingue physiquement par sa taille imposante, mais reste relativement inconnu du grand public. Ancien professeur de sciences politiques et animateur radio, il est entré dans le Frelimo, le parti au pouvoir, sans mandat électoral. Après diverses nominations administratives, il est devenu en 2015 responsable du district de Palma, dans le nord du pays, une région stratégique en raison des activités gazières. Par la suite, il a été nommé gouverneur de la province d’Inhambane avant de se voir désigner comme candidat à la présidentielle.
Mais pourquoi le Frelimo, parti historique du Mozambique, a-t-il choisi un candidat aussi peu expérimenté sur la scène politique ? Selon certains analystes, ce choix a été fait pour mieux contrôler un Frelimo divisé. Après plusieurs discussions et tentatives de compromis, le parti a opté pour Chapo, perçu par certains comme une « marionnette » qui serait plus facile à manipuler en raison de son manque d’envergure politique.
Daniel Chapo, un président de rupture, mais soumis au Frelimo
À 47 ans, Daniel Chapo devient le cinquième président du Mozambique, mais il se distingue de ses prédécesseurs par le fait qu’il n’a pas participé à la guerre civile qui a ravagé le pays entre 1975 et 1992. Il se positionne comme un symbole de renouveau, aussi bien pour son parti que pour la nation, et plaide pour l’unité et le dialogue national. « Le dialogue nous permettra de renforcer toujours plus la démocratie et notre succès en tant que peuple », a-t-il déclaré lors de sa victoire.
Se présentant également comme un homme du peuple, Chapo met en avant ses origines modestes, affirmant avoir grandi dans la pauvreté et avoir dû vendre des mangues pour acheter des fournitures scolaires. Cependant, pour beaucoup, son appartenance au Frelimo, symbole du pouvoir en place depuis l’indépendance, complique son aspiration à incarner un véritable changement. Selon José Lourenço, chercheur à l’université Eduardo Mondlane, « Il lui sera difficile de conquérir le cœur des Mozambicains tant qu’il sera du Frelimo. Les gens veulent du changement ».
À la veille de son investiture, plusieurs organisations de la société civile ont déposé une pétition auprès de l’Union africaine, demandant à l’organisation de ne pas reconnaître l’élection de Daniel Chapo, qu’elles estiment entachée d’irrégularités. La tension est donc loin de retomber, et le président élu devra faire face à des défis majeurs dès ses premiers pas à la tête du pays.