Les Forces armées nigériennes affirment avoir mené, le 15 août 2025, une opération aérienne d’une précision rare contre l’un des principaux chefs jihadistes du bassin du lac Tchad. Ibrahim Bakoura, alias Abou Oumaima, aurait été tué. Mais des experts appellent à la prudence.
L’armée nigérienne revendique l’élimination d’un chef de Boko Haram Ibrahim Bakoura
Le 15 août dernier, une opération militaire a été menée sur l’île de Shilawa, dans l’extrême sud-est du Niger. Selon l’état-major des Forces armées nigériennes (FAN), cette offensive, menée après plusieurs semaines de surveillance, a permis de neutraliser Ibrahim Bakoura, chef du groupe jihadiste Jama’atu Ahlis Sunna Lidda’Awati Wal-Jihad (JAS), une faction issue de Boko Haram. L’opération s’est déroulée en deux phases, une reconnaissance aérienne, suivie de trois frappes successives menées par un chasseur-bombardier.
Toutefois, les spécialistes demeurent prudents. Vincent Foucher, chercheur français et expert des groupes armés dans la région, rappelle que l’annonce de la mort de chefs jihadistes a souvent été prématurée dans le passé. « Les homonymies et la difficulté à obtenir des preuves directes sur le terrain ont déjà entraîné plusieurs erreurs », souligne-t-il. À ce jour, la faction JAS n’a publié aucun communiqué confirmant ou infirmant la disparition de son leader.
Incertitudes sur l’avenir de Jama’atu Ahlis Sunna Lidda’Awati Wal-Jihad (JAS)
Si la mort de Bakoura venait à être confirmée, elle ouvrirait une nouvelle phase d’incertitudes. Son autorité s’était imposée au prix de luttes internes, et de possibles rivalités pourraient fragiliser la cohésion de JAS. Mais l’organisation dispose encore d’assises financières solides, notamment grâce à sa mainmise sur le commerce halieutique dans le nord du lac Tchad. Ce socle économique pourrait lui permettre de surmonter une crise de leadership et de poursuivre ses activités, malgré une recomposition annoncée.
Figure centrale de l’insurrection jihadiste, Bakoura avait rejoint Boko Haram il y a plus de dix ans et s’était imposé à la tête de JAS après la mort de son mentor Abubakar Shekau en 2021. Sous son commandement, la faction s’est distinguée par une intensification des attaques dans le bassin du lac Tchad et par des enlèvements massifs, dont celui de centaines d’écoliers à Kuriga, au Nigeria, en mars 2024. Un récent rapport onusien, publié en juillet 2025, décrivait sa faction comme la plus active du mouvement, ayant étendu son emprise territoriale autour de la rivière Komadougou Yobé.