“The Bachelor” : une téléréalité qui soulève inquiétudes et indignation en Afrique !

Estelle Vodounnou
Lecture : 6 min
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La téléréalité “The Bachelor”, dont la troisième saison est actuellement en cours de diffusion dans plusieurs pays d’Afrique, suscite une vague d’indignations dans la partie francophone. Objet de vives critiques sur une “chosification” de la femme et de “promotion de la dépravation des mœurs”, l’émission importée des Etats-Unis, semble bien heurter les sensibilités locales.

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The Bachelor, c’est bien, la trouvaille de nombreuses téléspectatrices de Côte d’Ivoire, du Sénégal, de la Guinée, du Togo,  du Bénin, du Mali, etc. Très appréciée, particulièrement de cette cible de la jeunesse africaine, la téléréalité draine du monde à ses heures de diffusion. Et ceux qui ratent la diffusion en direct ne s’en privent pas malgré tout. Ils se rattrapent à travers les canaux digitaux où les commentaires fusent. Pour eux, “The Bachelor” représente une nouvelle forme d’émancipation amoureuse où la femme peut faire ses propres choix en dehors des sentiers traditionnels.

Les jeunes acteurs de l’émission, défendent l’idée que l’Afrique, en pleine transformation, doit être ouverte à des influences extérieures et s’adapter aux réalités du monde moderne. Pour eux, la diversité des modèles relationnels offerts par cette émission pourrait enrichir les discussions sur l’amour et le mariage, et contribuer à une redéfinition des normes culturelles. 

Cependant, bien que suivi avec une audience record notamment avec diffusion de la troisième saison, des voix s’élèvent pour interroger le bien fondé de cette téléréalité qui, selon elles, désacralise la femme africaine et expose la jeune génération à de forts risques de dépravation.

Chosification, désacralisation et dépravation, The Bachelor au banc des accusés

Le concept même de “The Bachelor” repose sur une mise en concurrence de femmes qui rivalisent pour l’attention et l’affection d’un homme. En lice, elles se préparent et se présentent à ce dernier comme un candidat face aux tests d’un concours. “Une triste réalité !”, déplore Belvis, un jeune ivoirien sur la page Facebook de l’émission. “La femme, doit-elle passer un concours avant d’être aimée?”, s’interroge Soraya, une étudiante béninoise qui s’est confiée à Africaho à Cotonou. “Faut-il vendre sa dignité, ses qualités, ses vertus en tant que femme africaine et ses mœurs avant de trouver son âme-sœur ?”, martèle pour sa part Kayivi, une commerçante togolaise qui exprime ainsi sa déception. Ce sont là, autant de questions qui taraudent les esprits.

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Pour ceux qui fustigent cette téléréalité, le rôle des femmes dans l’émission semble être celui de séduire et de plaire, renforçant ainsi des stéréotypes sexistes qui dévalorisent leur personnalité au moment où les sociétés africaines se battent pour l’émancipation féminine et la préservation de leurs valeurs culturelles.

Pour étayer leurs arguments, les détracteurs de The Bachelor pointent du doigt la banalisation de l’intimité physique, avec des scènes de baisers et de contacts rapprochés devant les caméras, laissant voir une dégradation des mœurs.

À travers le débat que cela suscite, se pose une question importante: “Comment l’Afrique peut-elle participer à l’évolution des normes mondiales tout en restant fidèle à ses racines et à son héritage culturel ?” Et c’est là, justement, qu’intervient la responsabilité des Etats.

Un vent d’interdiction sur l’émission en Afrique

Début septembre, la République Démocratique du Congo (RDC), a suspendu la diffusion de The Bachelor sur son territoire. Le Conseil supérieur de l’audiovisuel et de la communication (CSAC) de la RDC, a enjoint Canal+ de suspendre immédiatement toute diffusion de l’émission jusqu’à réception de la notification formelle par les autorités congolaises.

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S’en est suivi le Burkina-Faso qui, lui aussi, a interdit la diffusion de cette téléréalité sur son territoire à travers un communiqué de son Conseil Supérieur de la Communication (CSC). Le régulateur a jugé l’émission « stigmatisante pour la femme africaine, non protectrice de la jeunesse et contraire aux valeurs et aux mœurs du pays». Dans la foulée, des accusations similaires ont également été portées par le Conseil Supérieur de la Communication du Niger, qui a pour sa part, ordonné l’arrêt de la diffusion du programme, considérant qu’il porte atteinte aux valeurs nationales et à la dignité des femmes africaines.

Après la suspension de la téléréalité dans plus de trois pays africains, la survie de sa diffusion en Afrique reste hypothéquée, si d’autres capitales décidaient d’emboîter le pas à Kinshasa, Niamey et Ouagadougou.

Pour rappel, cette téléréalité a une origine américaine fondée sur le principe du jeu de la séduction et de rencontres arrangées. Elle a vu le jour le 25 mars 2002 sur la chaîne ABC et est présentée par c. Importée en Afrique, elle est lancée le 10 septembre 2024 et présentée par Emma Lohoues, influenceuse ivoirienne.

Actuellement à sa troisième saison, la téléréalité met en scène un célibataire au nom de Lamine Cissokho, un Sénégalais de 34 ans, diplômé en droit des affaires, banquier, acteur et mannequin devant choisir une compagne parmi vingt prétendantes.

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